Club la Lune Rousse (JdR) > Jeux et règles
Sombre
Johan Scipion:
5 démos à Senlud – juillet 2015 – Lieusaint
photo Julien De Monte pour Terres Etranges
Y'a dix jours, je reçois un mail de Julien qui me dit comme ça que y'a un festoche dans un coin de sa contrée lointaine (le sud 77, cette antichambre du Mordor). Senlud que ça s'appelle. Je réponds que ouais, pourquoi pas, faut essayer pour voir. Je contacte les orgas en dernière minute et bien entendu, y'a plus de stand dispo (normal, on est à une semaine de l'event). Par contre, je peux toujours venir poser du jeu à l'arrache sur une table libre.
Julien n'étant pas dispo le samedi (astreinte BBQ rôliste, un cas de force majeure), on convient d'y passer dimanche dans l'après-midi. Et heureusement d'ailleurs parce que samedi, il faisait encore 35 °C. On aurait littéralement cuit dans le gymnase de Lieusaint. Déjà qu'avec presque dix degrés de moins, c'était chaud patate. Alors la veille, j'ose pas imaginer le sauna...
Donc on se pointe en début d'aprème et c'est vachement sympa. Une grande salle avec plein de tables de jeu alignées au milieu et des stands sur les côtés. Classique et efficace. Y'a des familles, des gamins partout et une déco acidulée qu'elle flaire bon le platal. Parce qu'en vrai, c'est ça la conv : du jeu de plateau pour petits et grands. Y'a trois ou quatre rôlistes, je croise même deux Opaliens, mais c'est bien tout. Comme je m'y attendais, « La peur comme au cinéma » s'annonce ardue. Et de fait, elle l'est.
Le public est agréable, juste complètement pas du tout dans la cible de Sombre. Deux conséquences : 1/ le recrutement n'est pas super fastoche (il n'y a pas non plus des masses de monde, ça n'aide pas), et 2/ le public manque un poil de cette proactivité qui fait le fun des parties de Sombre. Résultat, je dois pas mal mouiller la chemise pour tirer le bousin vers le haut. Or je suis fatigué. Usé par la canicule et les démos de IRL Opale de mercredi, le petit père Johan.
Mais on lâche rien. On y croit, on se bat, on se démène. Julien et moi faisons ce qu'il faut pour que la table ne désemplisse pas : 5 démos dans la journée, dont un Dracula à huit joueurs. On va jusqu'à recruter un gamin de 6 ans (pour un Camlann assez fun) et une retraitée (un micro poil larguée la p'tite dame ^^). Tout ça est très laborieux. Un peu comme de courir un cent mètres au fond d'une piscine. T'avances, mais pas dans la facilité. On bosse, quoi.
Du coup, je décide que pour la dernière partie, on va se faire plaisir. Le travail est une chose, mais on a aussi droit à notre petite dose de fun. Je sors mon Chombre (scénar Zéro en cours de rodage, où qu'on joue des chats) et risque un playtest en conv, ce qui est rare. Bon, le risque n'est pas non plus démesuré car je l'ai déjà mené quatre fois aux Caves. C'était une première à cinq joueurs, cela dit. Car bien sûr, j'ai proposé un PJ à Julien pour lui montrer un peu la bêêête. Vu le gros coup de patte qu'il m'a donné durant toute l'aprème, il méritait bien cette petite exclu. La partie fut très plaisante. Ce n'est pas encore tout à fait ça (une grosse erreur de maîtrise, quelques détails techniques à affiner) mais ça commence à tenir debout. Cool !
À mesure que la culture ludique se démocratise en France (ce qui est excellent, j'applaudis des deux pognes), je vois de plus en plus d'events comme Senlud qui se montent : salle municipale, jeux pour petits et grands, ambiance famille et marmaille. Je kiffe. Le souci, c'est de faire tourner du Sombre dedans. Enfin, zéro souci en ce qui concerne le jeu. Il tourne bien. Les parties tiennent debout et, même quand je suis un peu crevé comme dimanche, je n'ai pas à en rougir. C'était très honnête.
Mais ça ne débouche sur rien. Pas tout à fait le même public (moins jeune adulte, plus famillial), mais exactement le même problème qu'au Dernier Bar en janvier dernier. Entendons-nous bien, je kiffe les casual gamers. Ils n'ont pas les réflexes rôlistes et si ça a ses inconvénients, ça a aussi pas mal d'avantages. La fraîcheur notamment. Le challenge aussi. Ça me sort de ma zone de confort et j'apprécie assez.
Le souci, c'est quand le public n'est que casual parce que là, c'est challenge sur challenge sur challenge. Et bon, cinq de suite, ça use un micropoil. Je préfère quand c'est un peu plus trop mieux mélangé, ce qui est le cas des events ludiques grand public un chouïa plus orientés culture geek. Niveau promo et buzz, je m'y retrouve plus. Là, je suis revenu avec une impression de journée à blanc. Cinq coups pour rien, on va dire. À (re)faire, mais pas trop souvent.
Les mercis
Merci aux orgas pour leur réactivité et leur accueil. Super merci à Julien pour la logistique et l'assistance sur place.
Mon body count
5 parties, 27 joueurs, 21 morts
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Johan Scipion:
Semaine Sombre : lundi – Back in bla-a-ack
Bonjour à tous.
C'est la rentrée. Tout beau, tout bronzé, vous reprenez le collier. Moi aussi, sauf qu'en fait, je ne l'ai jamais lâché. Plage, soleil, chips ? Que nenni ! Écriture (Sombre 5 est sur les bons rails) et playtest. Tout à vos vacances bien méritées, sans doute avez-vous raté mes comptes rendus estivaux. Hop, rattrapage express :
+ Fin juillet, X-Corpse et L'exorciste du Soleil Levant. Du Max qui dépote (apocalypse zombie, story deck, soft reboot, que du bonheur) et de l'horreur japonisante en Zéro premium.
+ Mi-août, Kill Karl et Patchwork, du Max bien fun (votre mission, si vous l'acceptez, buter Hitler trois fois de suite) et de l'horreur surréaliste en Zéro. Un week-end, deux séances, neuf parties. Pas mâââl.
Tout cela est bel et bon, mais ce n'est pas le seul objet de ce post. J'inaugure par le présent message la semaine Sombre, cinq jours durant lesquels je vais vous causer boutique.
Je le fais rarement, la dernière fois c'était en 2011, pour faire le bilan du premier numéro du fanzine. Je remets le couvert aujourd'hui parce que j'ai des bonnes (et des moins bonnes, mais heureusement surtout des bonnes) nouvelles à annoncer.
À demain !
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Johan Scipion:
Semaine Sombre : mardi – Pushing the limits ?
Je fais entre douze et quinze events par an, plutôt quinze ces derniers temps : conventions, festivals, salons, animations en clubs ou ludothèques. Et deux fois par mois, j'assure des parties aux Caves Alliées, le bar parisien dans lequel l'association Opale organise ses IRL. Au total, environ 200 démos annuelles.
Je pourrais peut-être faire plus, mais ce serait au détriment de ma santé (tout ça crève bien) et de ma productivité. Sombre ne s'écrit pas tout seul, en tout cas pas pendant que je suis par monts et par vaux. Or la publication est le nerf de la guerre : si je ne publie pas, ma carrière d'auteur fait du sur place et mon jeu crève. Je m'emploie donc à équilibrer mon temps de travail entre playstests, démos, écriture et édition. J'überkiffe cette diversité. Clairement, j'ai le meilleur boulot du monde. Il m'éclate et je m'éclate. En particulier, j'adore les conventions.
N'empêche que j'atteins ma limite. Sauf à me cloner, je ne vois pas comment faire plus. Ce d'autant que je plafonne niveau notoriété. Depuis dix ans que je suis dans le business des convs, comme dirait Inigo Montoya, j'en suis grosso merdo resté au même point : un auteur obscur qui promeut un jeu méconnu. Un petit gars qui pond un zine horrifique par an. Cela me convient par-fai-te-ment car je ne veux pas faire autre chose. C'est même, vous le lirez dans les prochains jours, l'exact objet de la semaine Sombre : trouver les moyens de continuer à faire ce que je fais, et si possible le faire mieux.
Entendons-nous bien, je ne suis pas un black metalleux. Je ne fais pas d'effort particulier pour que ma production reste confidentielle, le true underground n'est pas mon credo. Au contraire, je me bouge le cul pour faire connaître mon jeu. Juste, je veux avancer à mon rythme et selon mes conditions. Cramer les étapes aurait d'autant moins de sens que je suis bien aware de la réalité de mon activité et de ses perspectives de développement. Y'a carrément moyen de faire mieux et je m'y emploie, mais faut pas non plus que je rêve trop fort. La désillusion serait cruelle.
Pourquoi est-ce que je vous parle de tout ça ? Parce que dans le business des convs, la notoriété se mesure aux kilomètres de défraiement (et inversement). Plus un auteur est connu, plus on peut se permettre de le faire venir de loin. Or moi, j'ai de la notoriété pour aller jusqu'en Bretagne, en Belgique ou en Suisse, mais pas dans le Sud de la France. Ouais, la Suisse c'est loin aussi, mais le coût de la vie y est vachement plus cher, ce qui me rend meilleur marché. Marseille, Cannes, Toulouse, ça ne le fait pas et c'est bien parti pour ne pas le faire pendant encore longtemps.
Or moi, je veux diffuser Sombre jusque loin là-bas où qu'ils causent patois, y compris dans le deep deep South. Du coup, j'ai cogité sur les moyens de porter la bonne parole horrifique dans tous ces lieux où la main du Johan ne peut pas mettre le pied. Évidemment, j'ai pensé aux boutiques. Si j'arrivais à placer des revues sur leurs étagères, ça pourrait faire avancer mon petit bousin. Je ne les écoule pour le moment qu'en conventions et par correspondance. Y'a donc comme qui dirait un marché vierge qui me tend les bras.
En continuant à cogiter, je me suis dit que mon cadre juridique serait sans doute assez mal adapté à la vente en boutiques. Une asso 1901 ne me paraissait pas le meilleur outil pour faire du vrai business. Upgrader Terres Etranges serait cool. Monter une petite entreprise, voilà un projet super kiffant. Johan, éditeur de ses propres mains. Par Crom, ça aurait de la gueule ! Tellement en fait que j'ai commencé à me renseigner un peu sérieusement sur la question.
La suite demain.
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Johan Scipion:
Semaine Sombre : mercredi – Reality check
Résumé de l'épisode précédent : je cherche à mieux diffuser Sombre, mais mes moyens sont limités. Je me dis que le marché des boutiques serait peut-être la solution à mes problèmes. Du coup, je me renseigne pour évaluer la faisabilité du truc.
Je prends contact avec la boîte qui distribue la plupart des jeux de rôle en France. J'y vais la bouche en cœur, j'avoue. Ben oui, je fais un JdR et voudrais le vendre en magasin. Or y'a des gens dont le métier est justement de mettre du JdR dans des boutiques. Forcément qu'on va pouvoir bosser ensemble. Impéritie, dites-vous ? Oui, complètement. J'apprends mon boulot d'éditeur sur le tas et grappille du pEx à mesure que j'avance. Parfois (souvent, en fait), c'est un peu violent.
Or donc, je prends contact avec ce gros distributeur. Par mail, ça ne marche pas trop bien, alors je relance par téléphone. Coup de bol, je tombe direct sur un big boss. C'était pendant un gros festoche ludique. Tandis que ses subalternes étaient sur le pont, lui tenait le fort. Je lui explique mon projet. Blablabla Sombre blablabla quatre numéro parus, un cinquième en chantier blablabla boutiques.
Et là, le gars me répond « Ah mais non, c'est pas du jeu de rôle votre truc ». « Heiiiin ?!? » que je lui fais. « Ben oui, un jeu de rôle est un produit format A4, de 200 à 300 pages, avec une couverture cartonnée et en couleur. Tout le monde sait ça, voyons. Donc votre machin là, c'est pas du jeu de rôle. C'est juste un fanzine ». Oulala, c'te vieille odeur de napalm au petit matin !
Je tombe de ma chaise, me raccroche d'une main à mon bureau et contre argumente. Pas que je conteste l'idée que Sombre soit publié sous forme de fanzine. Je le revendique et ça m'éclate. Mais ce n'en est pas moins un jeu de rôle. Le nier, c'est confondre le fond et la forme, l'œuvre et le produit. Je défends mon bout de steak, quoi. En vain, vous vous doutez bien.
Avec le recul, je comprends la position du mec. Le ton était un poil, euh, rude, mais je saisis sa logique commerciale. Sombre serait de l'épicerie pour lui. Micro tirages, faibles marges, format non standard. Beaucoup de prises de tête pour pas grand-chose. Et bon, la distribution est un pur business. Carrément pas un milieu de mécènes ni de philanthropes amis des arts, hein.
Si je me suis mangé le truc si violent dans la face, c'est aussi parce que cette conversation téléphonique a eu lieu à peine une quinzaine de jours après que le BHL du JdR, ce cuistre, ait mis en ligne son podcast dans lequel il déniait à Sombre la qualité de jeu de rôle. Coup sur coup comme ça, ce fut bien hardcore. Prends ça dans les dents, Johan.
Alors quoi ? Trop indé pour le mainstream et trop mainstream pour l'indé, Sombre ? Il semblerait que je doive tracer ma propre voie, comme je le fais depuis le début de mon aventure éditoriale. J'espérais qu'à un moment, cela deviendrait un tantinet moins difficile. Mais en fait, non.
La suite demain.
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Johan Scipion:
Semaine Sombre : jeudi – Beam me up, Scotty
Résumé des épisodes précédents : cherchant à mieux diffuser Sombre, je contacte un gros distributeur pour voir s'il y a moyen de bosser avec lui et me fais napalmer la tronche. Le verdict est sans appel, Sombre n'est pas un jeu de rôle.
Après ce coup de fil, je dois dire que j'étais tout éparpillé de partout, façon puzzle. Déjà, j'ai commencé par me regrouper. Une fois que ce fut fait, je me suis remis à cogiter. OK, la distro pro c'était mort. Fallait-il donc que j'en reste là ? Continuer à écumer les convs avec mon assoce et à me heurter à ce plafond de verre qui me criiiispe ? J'avais trop le seum. Parce que cette idée d'entreprise me bottait bien. Elle me semblait aboutir si logiquement ma démarche d'écriture et d'édition que je rageais de devoir la remettre dans mon slip.
Sauf que sans l'ouverture vers le marché des boutiques, c'était un peu chaud. En passant d'une assoce à une entreprise, je me prendrais toute la fiscalité frââânçaise sur le coin de la gueule. En 1901, t'es grosso merdo en franco d'impôts. Si tu montes une boîte, t'as pas encore vendu un zine que déjà ça te coûte un rein. J'ai refait mes calculs dans tous les sens et suis arrivé à la conclusion qu'il y avait un vrai gros risque de plantage.
Actuellement, la revue Sombre va carrément bien. Elle génère du bénef et c'est cool. Mais pas assez pour faire vivre une boîte, fut-elle microscopique. Je ne parle même pas de me rémunérer, hein, juste d'arriver à l'équilibre financier sans prélever un centime sur le bousin. Rien que l'objectif zéro euro serait un putain de challenge. D'où l'espoir que je fondais sur le distributeur. Avec les boutiques, ça pouvait peut-être le faire.
Raaah.
Bon.
Sang.
De.
Putain.
De.
Merde.
Je n'ai qu'une vie. Ce n'est pas quand je serai mort que réaliserai mes projets. Et bordel, si y'a un truc que je veux faire avant de manger les pissenlits par la racine, c'est bien Sombre. J'ai la passion, la motivation, la détermination. L'œil du tigre, nom de Dieu. Ce ne sont pas un podcast à deux balles et un de coup de fil au napalm qui vont me démobiliser. Fuck les chieurs ! J'ai cassé ma tirelire et monté ma petite société. Terres Etranges est désormais une maison d'édition en bonne et due forme.
La suite (et la fin) demain.
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